M’sieur Fernand n’est pas plombier, pourtant c’est un beau métier ? Plombier : Chui pas plombier…bier, bier pourtant notre homme a du plomb dans l’aile : « Il n’a pas une santé de fer. Voilà plus de quinze ans qu’il vit à la campagne, qu’il se couche avec le soleil, et qu’il se lève avec les poules » en fin de semaine mais le reste de la semaine, en voiture, en train et en avion, il sillonne la France, de long en large et même en travers : « Heureux qui comme Charly ou Franky ou M’sieur Fernand… a fait de beaux voyages » ; alors fatigué, épuisé, éreinté, lessivé, la prévention « routière » n’y fait rien : alors il s’est donné le temps de rêver à un autre avenir, plus proche, plus localisé, plus proche des siens, de sa charmante Anne en particulier, qui comme lui partage une vie d’errance de « commis voyageur » : « Il ne rêvait pas en couleur, il ne rêvait pas en noir, il ne rêve pas du tout, il n’avait pas le temps ! » mais les rêves d’un avenir meilleur, le 22 aux Préaux, tournent souvent au cauchemar. Et quand ce grand sec d’échalas, au crâne luisant comme une balle de golf et au regard vif, ironique et accrocheur, qui a à peine tâté de l’ovale, rencontre un moins de 17, s’éveillent les traumatismes et les dégâts collatéraux qui s’en suivent pis que ceux de la guerre du golfe ; sagement, à un âge certain ou à un certain âge, il faut se résigner : les contacts physiques doivent laisser la place aux contacts humains. Et là, notre Tango Charly, ce n’est pas qu’un gros marchand de machines agricoles de Montauban, il sait y faire, il vous vendrait père et mère- pardon Monique et René, mais il n’a pas dû encore vous appareiller- ça va venir, ne vous inquiétez pas. « Alors ? Y dors le gros con : « Dis Tonton Trinqueur, pourquoi tu tousses ? » Et avec deux croissants !
Notre arrière petit-fils de pauvres paysans ben de chez nous -ça eut payé, mais ça paye plus ! Hein Crésus !-, manie la langue française avec toutes ses facettes et ses nébuleuses : il passe aisément du registre soutenu au registre populaire : ses bons mots animent les réunions, ses citations sorties de sa Bible réveillent la maison du rugby, d’autant que son humour n’a rien à envier à l’illustre Saint Beuve : « Il en est de la pointe de l’esprit comme d’un crayon, il faut recommencer à le tailler sans cesse ». Restons français et cet aiguillon si rare, si efficace le caractérise avantageusement : S’il maîtrise toutes la richesse de la langue de Molière, il connaît encore davantage toutes les phrases cultes de son vieil ami Audiard : il faut dire qu’il était à bon école avec une maman professeur émérite de latin et de littérature et que la banque de riches données de son père était tout aussi fournie : un condensé des Chiffres et des Lettres à la maison, et donc calculateur et cultivé l’animal. Sa sulfateuse crache de bons mots, grinçants ou sanglants, explosifs ou corrosifs, sa prose et son verbiage si imagés, si vivifiants, nous divertissent lors des articles (moins de 15 ou portraits) : Pollux, son disciple, bénéficie de ses précieux conseils. « Alors ? Y dors le gros con : « Dis Tonton Flingueur, pourquoi tu tousses ? » Et avec deux croissants !
M’sieur Fernand est né un dimanche, à l’heure de l’apéro, ceci explique peut-être cela : n’attendez pas qu’il reste les pieds ancrés au port, il a besoin de bouger même s’il s’en défend : la semaine à l’hôtel, tous les jours sur la route, il trace, il trace, le bougre : vous aurez bien du mal à suivre ses périples et c’est une gageure chaque fin de semaine de regagner son havre de paix auprès des siens qui lui manquent tant et ses minots qu’il entraîne si généreusement et durablement depuis qu’il s’est échoué au club pour suivre son fiston, le petit Arthur qui est devenu grand et sa légende ne fait que commencer : une bouffée d’iode qu’il partage avec son vieux complice, le dur à cuire Nico-cuisson qu’il est bien le seul à supporter- dixit l’intéressé lui-même.« Alors ? Y dors le gros con : « Dis Tonton Bringueur, pourquoi tu tousses ? » Et avec deux croissants !
« Un peu de quinine et un passe-montagne et le voilà requinqué ? On croirait qu’il repart au Tibet », un nouvel Everest pour un nouveau projet, pour une nouvelle mission mais « Touche pas au rugby, salope de boulot ! Les ruptures, les retrouvailles : les fluctuations de la fesse… » y connaît pas, il préfère les coquilles Saint Jacques au whisky, la langue sauce piquante, un bon vieux vin de paille du Jura ou les bons chasse-spleen, les crus de La Gaffelière : « Bah y dormira encore mieux quand il aura pris ça dans la gueule ! Il entendra chanter les anges le gugusse de Montauban... On va le renvoyer tout droit à la maison mère... Au terminus des prétentieux ». Tchin ! Tchin ! « Alors ? Y dors le gros con : « Dis Tonton Goinfreur, pourquoi tu tousses ? » Et avec deux croissants !
Vous l’avez compris, cet « oiseau voyageur » qui n’a pas le temps de se poser tant il migre est exigeant avec les autres mais d’abord avec lui-même et maniaque de l’ordre : dans son métier, ce sont des atouts et si les « chasseurs de tête » l’ont repéré bien vite, ils doivent maintenant chercher à ne pas être décapités. L’Affreux Loup doit trembler dans ses bergeries branchées, l’haineux mouton se rebiffe et va le dévorer!
Fils prodigue et fils unique, philosophe et philanthrope, feel so good et feel all right, fil à retordre et fil à la patte, notre filiforme Franck excelle en tout : son verbe irradie et illumine les assemblées, son charisme regroupe les plus réfractaires, sa convivialité communicative ravive les plus sceptiques et isolés … un de ces membres indispensables aux autres « Tontons » qui prolifèrent en ces temps de morosité et à la Communauté de l’Ovale, bah aujourd’hui les œufs cassés sont au même prix : « Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière » et la tienne nous éclaire et nous réchauffe. Merci à Toi M’sieur Fernand, t’es sur orbite, t’as pas fini de tourner, alors laisse nous profiter de ta générosité et de ta gentillesse : c’est étudié pour !
Ps : « Heureux celui qui a de l’esprit car il sera le dernier … de la saison 4 des portraits ».